Imposition et revenu immobilier: comment décrypter ce casse-tête belge ?

Imposition et revenu immobilier: comment décrypter ce casse-tête belge ?

9 minutes de lecture

Léa Léonard 👩🏻‍💻

Léa Léonard 👩🏻‍💻

Spécialiste du décryptage immobilier en Belgique

Juin marque l’arrivée de votre déclaration d'impôts dans votre boîte aux lettres, à compléter et renvoyer d’ici mi-juillet. Tout un volet relève de vos revenus immobiliers. En quoi cela consiste-t-il et quelle influence a-t-il sur le montant final ? On vous fait un compte-rendu dans les grandes lignes de ce casse-tête fiscal.

Sources: L'EchoSPF & Lexalert

Les revenus immobiliers sont tous les revenus qui proviennent de vos biens immobiliers (maisons, appartements, terrains, etc.) et qui ne sont pas imposables en tant que revenus professionnels ou divers.

En d’autres mots, si vous possédez une habitation ou un terrain, loués ou non, vous devrez les déclarer... Cela ne concerne pas votre habitation familiale - aussi appelée “habitation propre” par le fisc - qui est, elle, exonérée d’impôts (sauf dans des cas exceptionnels, comme par exemple si vous utilisez ce bien pour votre profession).

La base pour le calcul de l'impôt sera le plus souvent le revenu cadastral (RC), c’est-à-dire le revenu annuel fictif qu'un bien immobilier est censé rapporter. Ce revenu cadastral est indexé chaque année, mais vous devez toujours indiquer le montant non indexé. Enfin, à noter que selon l’affectation du bien, les revenus immobiliers peuvent également être déterminés sur base du loyer perçu.

Qui doit déclarer les revenus immobiliers ?

Les revenus immobiliers sont normalement imposables dans le chef du propriétaire. Si la propriété du bien est démembrée, c’est l’usufruitier qui devra le déclarer.
Si vous êtes propriétaire d’un bien immobilier avec une autre personne, vous devez déclarer la partie du revenu cadastral qui correspond à votre part de propriété dans le bien immobilier.
Enfin, si vous n'êtes propriétaire ou usufruitier d'un bien que pendant une partie de l'année, vous devrez déclarer le RC au prorata du nombre de jours (par exemple 70j/365).

Selon leur régime matrimonial, les conjoints et les cohabitants légaux déclarent chacun leurs propres revenus immobiliers et/ou la quote-part de leurs revenus communs. Ainsi, les couples mariés sous la communauté de biens ou selon le régime légal doivent répartir les biens immobiliers à 50/50 dans la déclaration. S'ils sont mariés sous le régime de la  séparation de biens ou cohabitants légaux ou de fait, ou s'ils sont copropriétaires sans cohabiter, ils déclareront les revenus immobiliers au prorata de leur part dans la propriété.

1er cas : mariage sous le régime légal

On distingue 3 patrimoines: le patrimoine propre de l’époux A, le patrimoine propre de l’époux B et le patrimoine commun aux deux époux.

Les biens immobiliers obtenus avant le mariage, ou par donation, succession ou testament sont propres à chacun des époux. Il en va tout autrement des revenus (revenu cadastral, loyers…) tirés de ces biens immobiliers. Ces derniers appartiennent au patrimoine commun des époux. Ils doivent alors être déclarés à concurrence de 50 % par chacun des époux.

Exemple : Monsieur et Madame Dupont sont mariés sous le régime légal. Madame Dupont est propriétaire d’une habitation qu’elle avait achetée avant son mariage. Cette habitation est louée et a un revenu cadastral non indexé de 1.000 €. Bien que le bien immobilier soit la propriété exclusive de Madame Dupont, les revenus immobiliers de l’habitation sont communs. De ce fait, les deux conjoints doivent mentionner la moitié du revenu cadastral dans leur déclaration d’impôt (et non pas se baser sur leur part de propriété). Autrement dit, madame Dupont doit mentionner 500 € tandis que monsieur Dupont mentionnera également 500 €.

2e cas : mariage sous le régime de la séparation de biens

Sous le régime de la séparation de biens, il n’y a pas de patrimoine commun. Chacun des époux conserve la propriété de tous ses biens. Les biens que les deux époux achètent ensemble sont en principe propres à chacun d’eux pour moitié. Les revenus (revenu cadastral, loyers…) tirés de ces biens immobiliers propres sont également propres. Par conséquent, chaque époux doit déclarer les revenus tirés de ces biens immobiliers propres.

Exemple : Monsieur et Madame Dupont sont mariés sous le régime de la séparation de biens. Monsieur Dupont est propriétaire d’une habitation qui est louée et dont le revenu cadastral non indexé est de 1.000 €. Madame Dupont ne possède aucun bien immobilier. Monsieur Dupont doit mentionner 1.000 € tandis que Madame Dupont ne doit rien mentionner.

3e cas : la cohabitation légale

Les patrimoines des cohabitants légaux restent séparés. Le régime de la cohabitation légale est comparable à celui des partenaires mariés sous le régime de la séparation de biens (2e cas de figure).

Habitation propre

Dans quels cas dois-je mentionner les revenus immobiliers de mon « habitation propre » dans ma déclaration d’impôt ?

Pour le fisc, l'habitation "propre" est l'habitation où vous avez votre domicile fiscal. Il s'agit donc normalement de l'habitation où vous êtes domicilié comme propriétaire ou usufruitier. Pour rappel, les revenus immobiliers de votre habitation propre sont toujours exonérés et vous ne devez plus les mentionner dans votre déclaration d’impôt.

Il est important de savoir ce que revêt la notion d'habitation "propre", car cela va déterminer le niveau de compétence. Ainsi, s'il ne s'agit pas de votre habitation "propre” la compétence passe du régional au fédéral, ce qui implique d'autres règles (oh, douce Belgique).

Vous ne pourrez parfois considérer qu'une partie de votre habitation comme "propre" :

  • C’est la cas si vous utilisez une partie de votre habitation propre pour votre activité professionnelle et déduisez une partie des loyers de vos frais professionnels ou si une partie de cette habitation est occupée par une personne qui ne fait pas partie de votre ménage.

Cette partie ne comptera donc pas comme "propre".

À noter que si vous louez votre habitation propre parce que vous ne pouvez l'occuper personnellement pour une raison sociale ou professionnelle (vous vivez par exemple chez un parent nécessitant des soins ou louez un appartement plus proche de votre travail) ou encore que l'état des travaux de construction/rénovation ne vous permet pas d'occuper le bien effectivement, vous pouvez malgré tout la considérer comme votre habitation propre et ne devez rien déclarer, sous réserve du respect des conditions légales.

Enfin, lorsque vous avez conclu un emprunt hypothécaire/dette qui génère des intérêts pour votre habitation propre, dans votre déclaration fiscale, vous devez reprendre le revenu cadastral non indexé ainsi que ces intérêts.

J’utilise une partie de mon habitation à des fins professionnelles. Comment dois-je déclarer mes revenus immobiliers ?

Vous devez tout d’abord déterminer la partie du bien immobilier que vous utilisez pour votre profession et devrez déclarer cette partie du revenu cadastral (non indexé). Comme à son habitude, la partie de l’habitation destinée à l’habitation propre ne doit pas être déclarée.
Le solde doit être ensuite déclaré à titre de revenu immobilier.

Exemple : Monsieur Dupont est propriétaire d’une habitation, dont le revenu cadastral non indexé est de 1.000 €, dans laquelle il réside (habitation propre) mais qu’il utilise également à 50% pour ses activités professionnelles. Il devra dès lors mentionner 500 € dans sa déclaration d'impôts.

Bien immobilier en location

Je suis propriétaire d’un bien en Belgique que je loue à un particulier. Comment dois-je déclarer mes revenus immobiliers ?

Si le particulier n’utilise l’habitation qu’à des fins privées

Vous devez déclarer le revenu cadastral non indexé. Le fisc indexera et majorera de 40% ce revenu cadastral et l'ajoutera à vos revenus qui seront imposés au même titre que vos revenus professionnels .

À noter que si le bail ne ventile pas les parts meuble/immeuble, la partie réservée à la location mobilière est de 40% du loyer total.

Exemple : Madame Dupont donne en location un appartement dont le RC non indexé est de 1.500 €. Elle loue ce bien à un particulier pour 1.200 € par mois, ce qui lui procure donc un loyer annuel de 14.400 €. Madame Dupont paiera un précompte immobilier calculé sur le RC indexé de 1.500 € x 1,7863 (index de 2018) = 2.680 €.  
Madame Dupont est en outre imposée sur cet appartement dans sa déclaration fiscale, non pas sur ses loyers réellement perçus, mais sur le RC de 1.500 € x 1,40 x 1,7863 soit 3.752 €. Imaginons que Madame Dupont, avec ses revenus professionnels confortables, se situe dans la tranche marginale d’imposition de 50%, elle sera donc imposée à hauteur de 50% des 3.752 € soit 1.876 €.
Sur une année, Madame Dupont devra donc s’affranchir d’un impôt total de 4.556 € sur les 14.400 € de revenus locatifs.

Si le locataire affecte partiellement le bien loué à l’exercice de son activité professionnelle

Il faut distinguer les éventualités suivantes :

  • Si le contrat de bail est enregistré et que le loyer y est clairement scindé entre partie privée et professionnelle, distinguez sur votre déclaration la partie privée et la partie professionnelle du RC ainsi que la partie professionnelle du loyer annuel brut, c’est-à-dire le loyer effectivement perçu, augmenté des charges locatives que le locataire a payées pour vous mais diminué des frais que vous avez payés pour le locataire.

  • Si le loyer prévu dans le contrat de bail ne scinde pas la partie privée de la partie professionnelle, l'ensemble du RC devra être déclaré ainsi que la totalité du loyer brut. Le propriétaire sera donc plus lourdement imposé.

Si vous louez un bâtiment ou un terrain à un indépendant qui utilise le bien immobilier pour une activité professionnelle, à une société ou à une association

Vous devrez déclarer deux choses. Tout d'abord le RC du bien ou du terrain et ensuite, le loyer annuel brut, diminué d’une déduction forfaitaire de 40%. Attention toutefois, le montant de la déduction forfaitaire ne peut cependant pas être supérieur aux deux tiers du RC non indexé, multipliés par un coefficient fixé en fonction de l’évolution des baux commerciaux. Pour l’exercice d’imposition 2018, ce coefficient est de 4,39.

Exemple: Madame Dupont donne en location à un expert-comptable un espace de bureau pour 1.800 € par mois. Partons du principe que l’emprunt qu’elle avait contracté pour l’achat de ce bureau est totalement remboursé -elle n’a donc plus de charges d’intérêts.

Le comptable paie à Madame Dupont, en plus du loyer, un montant de 200 € à titre de contribution aux charges d’entretien et de chauffage. Le revenu locatif mensuel brut est donc de 2.000 €, soit 24.000 € annuellement.

Normalement, Madame Dupont pourrait déduire un forfait de 40%, soit 24.000 € x 40% = 9.600 €, ce qui ramènerait sa base imposable à 24.000 € – 9.600 € = 14.400 €. Mais le montant forfaitaire ne peut pas être plus élevé que les deux tiers du RC non indexé multipliés par 4,39 (coefficient de 2018).

Comme le RC est de 1.500 €, ce forfait ne peut donc pas excéder 1.500 € x 2/3 x 4,23 = 4.230 €. Madame Dupont sera donc imposée, non pas sur 14.400 €, mais sur 24.000 € – 4.230 € = 19.770 €.

Madame Dupont paie donc un précompte immobilier calculé sur le RC indexé de 1.500 € x 1,7057 = 2.558 €. En outre, Madame Dupont est également imposée à l’impôt des personnes physiques sur le revenu locatif de 19.770 €.

Dans l’hypothèse où le revenu de Madame Dupont est soumis à la tranche d’imposition la plus élevée de 50% elle paiera sur ce revenu locatif 9.885 € d'impôt.

Au total (impôt et précompte additionné) Madame Dupont devra payer 2.558 € + 9.885 € soit 12.443 € sur un revenu locatif brut de 24.000 €.

Si vous louez un bien immobilier meublé

Vous serez imposé distinctement pour le bien immobilier et les meubles. Pour la partie immobilière, vous serez imposé sur la base du RC total déclaré. La partie meublée représentera quant à elle un revenu mobilier à reprendre également dans la déclaration. Vous indiquerez normalement 20% du loyer brut, parce que la part des meubles sera estimée forfaitairement à 40% mais que vous pouvez déduire des frais forfaitaires de 50 % pour l'achat et l'entretien. Le fisc impose la partie meublée à 30 %.

Exemple : Monsieur Dupont donne en location un appartement meublé dont le RC non indexé est de 1.500 €. Il loue ce bien à un particulier pour 1.400 € (divisé comme suit: 1.200 € pour l’appartement et 200 € pour les meubles) par mois, ce qui lui procure donc un loyer annuel de 16.800 €. Monsieur Dupont paiera un précompte immobilier calculé sur le RC indexé de 1.500 € x 1,7863 (index de 2018) = 2.680 €.

Monsieur Dupont est en outre imposé sur cet appartement dans sa déclaration fiscale, non pas sur ses loyers réellement perçus, mais sur le RC de 1.500 € x 1,40 x 1,7863 soit 3.752 €. Imaginons que Monsieur Dupont, comme sa femme, se situe dans la tranche marginale d’imposition de 50%, il sera donc imposé à hauteur de 50% des 3.752 € soit 1.876 €.

Enfin, Monsieur Dupont est également imposé sur le mobilier de cet appartement, à hauteur de 40% du loyer annuel perçu pour le mobilier, soit 2.400 x 40% = 960 € mais dont 50% peuvent être déduit comme frais pour l’achat et l’entretien, ce qui nous ramène à 480 €. Ce montant sera imposé à hauteur de 30% soit 144 €.

Sur une année, Monsieur Dupont devra donc s’affranchir d’un impôt total de 4.700 € (2.680 € + 1.876 € + 480 €) sur les 16.800 € de revenus locatifs.

Je suis propriétaire d’un bien immobilier à l’étranger que je loue. Comment dois-je déclarer mes revenus immobiliers ?

Dans ce cas, vous devez déclarer le loyer brut de cet immeuble après déduction des impôts étrangers afférents à cet immeuble.

Seconde résidence

Je suis propriétaire d’un bien immobilier situé en Belgique que j’utilise comme résidence secondaire. Comment dois-je déclarer mes revenus immobiliers ?

Si vous possédez une deuxième habitation, ou un terrain, mais ne le louez pas, indiquez le revenu cadastral (non indexé) dans votre déclaration d'impôt. Le fisc indexera (le coefficient d’indexation pour les revenus 2018  est de 1,7863) et majorera de 40% ce RC et l'ajoutera à vos revenus qui seront imposés au taux de la tranche la plus élevée de vos revenus.

Je suis propriétaire d’un bien immobilier situé à l’étranger. J’utilise l’habitation comme résidence secondaire. Comment dois-je déclarer mes revenus immobiliers ?

Dans ce cas, vous devez déclarer la valeur locative brute de cet immeuble après déduction des impôts étrangers afférents à cet immeuble. La valeur locative est le loyer brut moyen annuel que vous auriez pu recueillir si le bien avait été mis en location. L’Administration accepte que la valeur locative soit déterminée sur base d’une valeur établie ou expressément admise par l’autorité étrangère.

Exemple: Petit veinard, Monsieur Dupont possède également un studio à la Mer du Nord, dont le RC non indexé est de 850 €. Ne le louant pas, sa propriété sera taxée à hauteur 50% (tranche marginale d’imposition) de 2.126 € (850 € x 1,4 x 1,7863), soit 1.063 € en plus de son précompte immobilier.

Je suis propriétaire d’un bien immobilier situé à l’étranger. J’utilise l’habitation comme résidence secondaire. Comment dois-je déclarer mes revenus immobiliers ?

Dans ce cas, vous devez déclarer la valeur locative brute de cet immeuble après déduction des impôts étrangers afférents à cet immeuble. La valeur locative est le loyer brut moyen annuel que vous auriez pu recueillir si le bien avait été mis en location. Le fisc accepte que la valeur locative soit déterminée sur base d’une valeur établie ou expressément admise par l’autorité étrangère (par exemple, comme notre revenu cadastral). Les pays qui utilisent le même système que la Belgique sont, par exemple, la France, l’Espagne, le Portugal ou encore l’Italie. Dans ce cas, vous pouvez déclarer uniquement ce revenu cadastral étranger dans votre déclaration fiscale.

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Louise Gournon

Louise Gournon

General Manager We Invest Belgique