Podcast sur la location à Bruxelles

Encadrement des loyers en 2025 : protection ou risque pour le marché locatif ?

4 minutes de lecture

Laureline Bragard ✍️

Laureline Bragard ✍️

Experte Immo' à Bruxelles

Bruxelles cherche-t-elle à réguler son marché locatif ou à faire fuir les investisseurs privés ? En janvier 2025, la Région a reconnu son premier cas de loyer abusif, posant ainsi les bases d'une régulation plus stricte du marché locatif. Une décision pavée de bonnes intentions mais qui suscite autant d’espoir que de craintes… Décryptage.

Un premier loyer abusif reconnu : un signal fort

Pour la première fois à Bruxelles, un loyer a été jugé abusif par la commission paritaire locative. Il s’agissait d’un loyer de 1 250 € mensuels pour un bien dont le loyer de référence était estimé à 850 €. Cette décision marque une étape supplémentaire dans la régulation du marché locatif bruxellois, donnant un signal clair quant à la volonté des pouvoirs publics de mieux encadrer les loyers.

Actuellement, cette commission donne des avis non contraignants. Toutefois, les partis Écolo et PS militent pour renforcer son pouvoir, une proposition ayant été déposée au Parlement en ce sens. Ainsi, depuis 2024, une nouvelle ordonnance impose à tous les baux de mentionner le loyer de référence. Un loyer est dès lors considéré comme abusif s’il dépasse de plus de 20 % cette référence officielle. Cette mesure vise à renforcer la transparence et protéger les locataires contre des hausses excessives.

Cependant, l’encadrement des loyers reste sujet à débat. Pour beaucoup d’experts, si cette régulation est initialement pavée de bonnes intentions, visant à mieux protéger les locataires, elle pourrait également dissuader les investisseurs immobiliers, réduisant ainsi l’offre de logements disponibles, déjà en décalage avec la demande qui ne cesse d’augmenter. Autrement dit, en restreignant trop la liberté des propriétaires, on pourrait aggraver la pénurie de biens locatifs.

Un marché locatif sous tension

L’année 2024 a été marquée par un rush sur la location. De nombreux ménages, ne pouvant plus acheter, sont restés locataires, alimentant ainsi une demande largement supérieure à l’offre. Cette situation s'est aggravée avec le retrait progressif des propriétaires-bailleurs du marché locatif depuis 2023… pour plusieurs raisons :

  • La volatilité des taux est une première explication. La grande majorité des investisseurs immobiliers belges ont un profil « bon père de famille », souhaitant placer leur épargne dans un actif qui prend de la valeur et leur assure une pension plus confortable. L’augmentation des prix suivie par celle des taux a introduit un degré d’incertitude, décourageant certains d’entre eux.

  • Une multiplication des contraintes administratives telles que le double enregistrement des baux auprès des instances fédérales et désormais régionales, soulignant le manque criant de communication et d’harmonisation entre les institutions#bonjour2025. Une digitalisation qui tarde à venir et… c’est encore aux propriétaires privés d’en payer le prix.

  • Le droit de préférence pour les locataires : Les propriétaires doivent désormais proposer leur bien en priorité à leur locataire en cas de vente. Si, à nouveau, la mesure est louable, les résultats sont loin d’être probants : on constate un rallongement du processus de transaction de 1 à 2 mois pour de maigres résultats - moins de 1 % des locataires achètent le bien qu’ils occupent.

  • Les obligations de rénovation énergétique : d’ici 2033, les passoires énergétiques devront avoir disparu du paysage locatif bruxellois, à charge pour les propriétaires de rénover dans ce délai. Cela suppose déjà qu’un propriétaire dispose d’une telle somme pour entreprendre ces travaux, mais cela implique aussi une augmentation des loyers pour compenser ces investissements.

Face à ces contraintes, une étude de la KBC indique que 32 % des bailleurs bruxellois envisageraient de vendre leur bien. Or, si le marché se vide de ses bailleurs privés, l'offre de logements à Bruxelles continuera de s'amenuiser. Répondant à la loi de l'offre et de la demande, les loyers continueront inexorablement à grimper.

Trouver un équilibre entre protection et attractivité

Crédit pont

Bref, le marché locatif bruxellois, bien qu’encore rentable, souffre d’un manque d’attractivité grandissant… avec un risque immédiat : l’accentuation du déséquilibre entre l’offre (en déclin) et la demande (en constante augmentation).

Plutôt que de fixer des plafonds stricts et d’accroître les contraintes, les professionnels du secteur suggèrent d’encourager les bailleurs privés, avec des solutions alternatives :

  • Encourager la construction et la rénovation pour augmenter l’offre locative et réduire la pression sur les loyers.

  • Faciliter l’obtention des permis de construire pour fluidifier le marché immobilier.

  • Mettre en place des incitants fiscaux, notamment pour favoriser l’investissement locatif à vocation sociale, comme les AIS, plutôt que d’adopter des mesures punitives.

L’année 2025 sera donc déterminante pour observer l’impact réel de ces mesures et voir si Bruxelles parvient à trouver un équilibre entre la protection des locataires et l’attractivité pour les investisseurs. Une chose est certaine : toute régulation doit être pensée en fonction des réalités du marché, sous peine d’aggraver la crise du logement plutôt que de la résoudre.


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Léa Léonard 👩🏻‍💻

Léa Léonard 👩🏻‍💻

Spécialiste du décryptage immobilier en Belgique